La meilleure manière de commémorer l’armistice, c’est d’agir pour la fédération européenne
Douaumont - Dennis Knake - Licence CC via Flickr
Nous commémorons cette année le centenaire de l’armistice du 11 novembre 1918, venue mettre un terme à la folie meurtrière que fut la première guerre mondiale.
Les séquelles encore visibles de la frénésie destructrice qui avait alors enflammé l’Europe, et le monde, nous rappelle la nécessité vitale de continuer inlassablement d’agir pour instaurer une paix durable entre les peuples. Le seul moyen d’y parvenir : la création d’une fédération européenne, et à terme, mondiale.
De la nécessité d’envisager la mémoire de manière collective
En ces jours de commémorations, il s’agit de se souvenir, ensemble, et de saluer le retour de la paix entre les Européens et en aucun cas de célébrer une victoire « française » sur l’Allemagne de l’époque.
Le travail de mémoire doit sortir du carcan national dans lequel il est souvent enfermé et être envisagé de manière globale, pour que les blessures des peuples soient considérées dans leur ensemble. Les récits « nationaux » doivent évoluer . À cet égard, la main tendue de François Mitterrand à Helmut Kohl en 1984, ou même l’inauguration d’un « anneau de mémoire » par François Hollande en 2014, constituaient des symboles autrement plus positifs.
S’il est utile de commémorer ce centenaire, il convient néanmoins de garder à l’esprit que les canons ne se sont vraiment tus sur le continent européen qu’après un second conflit mondial, ajoutant à l’horreur et au traumatisme déjà causés. dont l’horreur n’a rien eu à envier à celle des tranchées.
Repenser les relations internationales...
La signature de l’armistice n’ayant été accompagnée que d’un développement insuffisant et insatisfaisant des relations internationales, les gouvernements, enfermés dans leurs idéologies nationalistes et leurs conceptions égoïstes de la souveraineté, ne sont pas parvenus à brider leurs volontés respectives de puissance.
En Europe, le seul moyen de faire cesser ces guerres fratricides est né de la mise en commun au niveau européen du charbon et de l’acier qui avaient précisément servi à alimenter les conflits passés, suite à l’appel du 9 mai 1950, point de départ de la construction européenne.
Pourquoi ne pas utiliser le même concept au niveau mondial ? La mise en place d’un système efficace international, voire fédéral, de régulation des relations entre États, fondé sur le droit, le principe de subsidiarité et la capacité à faire respecter les engagements de chacun, permettrait d’empêcher l’expression exacerbée des nationalismes et le développement des rivalités entre les peuples. On pourra ici saluer l’initiative du Forum de la Paix, organisé à Paris le 11 novembre, mais regretter qu’il ne soit pas porteur de réformes profondes pourtant nécessaires.
… et la place que doit y occuper l’Union européenne
Aujourd’hui, à l’heure où les États-Unis ont cessé d’être les gendarmes du monde et ont mis fin à leur rôle de leader au sein des instances internationales telles que l’Organisation des Nations Unies, à l’heure où la Russie estime, quant elle, que les choses peuvent être réglées par la force, qu’elle emploie de manière unilatérale et sans concertation avec personne, il est impératif pour l’Union européenne de se doter d’une défense et d’une diplomatie réelles. Cela passe notamment par la création d’un véritable ministre européen des affaires étrangères, au même titre qu’un ministre de la défense de l’Union.
La solution ne pourra être trouvée qu’au travers d’une véritable réforme des traités et de la structure institutionnelle de l’Union, dans laquelle le Parlement européen, seule institution directement élue des citoyens, aurait les moyens de contrôler la politique mise en place. L’idée, aujourd’hui promue par la France, de créer une « armée européenne » par le biais d’une coopération renforcée entre États membres doit ainsi être considérée comme un premier pas positif mais insuffisant.
Cent ans après la signature de l’armistice de 1918, le constat est sans appel : seule la mise en place d’un modèle fédéral permettra à l’Europe – et au monde – d’éviter durablement la résurgence de nouvelles guerres à grande échelle.
11 novembre 2018
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