Élargissement et avenir de l’Union européenne
Avertissement : les tribunes sont des contributions individuelles de sympathisants du mouvement au débat et ne reflètent pas nécessairement les positions de celui-ci.
“La capacité d’intégration de l’Union à assimiler de nouveaux membres tout en maintenant l’élan d’intégration européenne constitue également un élément important répondant à l’intérêt général aussi bien de l’UE que des pays candidats”.
Cette phrase fait suite - dans le texte - à l’énoncé des trois critères fixés par le Conseil européen de Copenhague (1993) pour l’adhésion de nouveaux États membres [1].
En résumé, ce “quatrième critère de Copenhague” implique que toute décision d’élargissement doit être appréciée non seulement en fonction du respect des critères imposés aux candidats - mais aussi au regard de la capacité propre d’intégration de l’UE.
La Commission a d’ailleurs précisé en 2006 :
“L’adhésion d’un nouvel État doit être compatible avec le fonctionnement efficace des Institutions et des procédures décisionnelles de l’Union et ne pas remettre en cause les poltiques communes et leur financement."
Le quatrième critère de Copenhague a été largement ignoré/contourné dans le passé - et il semble devoir continuer à l’être lors des prochaines vagues d’adhésion.
On peut tout de même tenter d’énumérer - dans le désordre et sans les developper - les principales composantes de ce critère sous l’angle des problèmes que soulèvent les élargissements successifs de l’UE :
- les risques de dysfonctionnement du Conseil [2], de la Commission [3], de la Cour de Justice [4] voire du Parlement au-delà d’un certain nombre de membres,
- la capacité de financement par l’UE des politiques communes (notamment les politiques de “cohésion”) face aux besoins de nouveaux États peu développés,
- la capacité physique des nouveaux États à satisfaire aux exigences de certaines politiques communes (Euro, environnement, concurrence, énergie,…) sans en freiner le développement,
- l’accroissement de la diversité politique, économique, sociale, culturelle, linguistique, … entre les États,
- la multiplication du nombre des “petits” États qui doivent être traités de manière égale avec les “grands”,
- la perte de repères géographiques et culturels de l’opinion (“Quelles sont les frontières de l’Europe”) et l’affaiblissement consécutif de l’ "affectio societatis” européen,
- l’accroissement du risque de dissensions inter-étatiques et de désordres intra-étatiques,
- le freinage de la réalisation progressive de l’Union politique, notamment sur les plans de la diplomatie et de la défense,
- le respect des “valeurs” fixées par l’article 2 du Traité,
- l’impact géo-politique des élargissements vis à vis des puissances limitrophes (Russie),
- le risque de fragmentation interne de l’UE en blocs géographiques (O/E, N/S) ou en cercles (olympiques ou concentriques),
- etc.
À l’heure où la Commission et le Conseil viennent de sonner la fin de la “pause” du processus d’élargissement [5] et s’apprêtent à le reprendre en fanfare avec les six États des Balkans (voire, à plus long terme, avec trois ou quatre États du "partenariat oriental") - il serait peut-être temps temps de prendre plus sérieusement en compte le 4e critère de Copenhague.
Et surtout de “consulter” l’opinion sur l’opportunité de cette deuxième vague d’élargissement. L’exercice des consultations démocratiques voulues par le Président Macron devrait en être l’occasion.
Les dirigeants des Institutions et des États ne devraient pas oublier que tout nouvel élargissement devra être approuvé par referendum dans plusieurs des États membres.
L’histoire enseigne que l’éclatement des empires est souvent causé par leur extension démesurée qui provoque une perte d’unité et de contrôle de l’ensemble.
Où se situe - pour l’Union en tant qu’ “empire" politico-économique - le point de rupture ?
La question mérite au moins d’être posée.
Jean-Guy Giraud 13 - 01 - 2018
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