La nécessité d’une Europe de l’Energie
Avertissement : les tribunes sont des contributions individuelles de sympathisants du mouvement au débat et ne reflètent pas nécessairement les positions de celui-ci.
La COP 21 cristallise les enjeux politiques, économiques et sociaux induits par le changement climatique. En définissant l’architecture d’une gouvernance mondiale du climat, la conférence ouvre de nouveaux espaces de discussion au niveau international. Pourtant, elle devrait également être l’occasion d’introduire de nouveaux champs de débat au niveau régional, à commencer par l’Union Européenne.
L’environnement a trop souvent été négligé dans les débats au sein de l’arène européenne, lui préférant les termes de marché commun, ou de marché unique. Pourtant, il est un défi posé non seulement à l’égard du traditionnel État-Nation en excédant son cadre, mais également aux regroupements régionaux. L’approche de la COP 21 devrait ainsi être l’occasion de reconsidérer la gouvernance européenne en la matière, et de jeter les bases d’une véritable et effective Union de l’énergie.
La nécessité criante d’une Europe de l’énergie
C’est une lapalissade que de dire que les politiques énergétiques ne peuvent plus se penser à l’échelle nationale mais doivent au contraire faire l’objet d’une concertation européenne.
Les tâtonnements des politiques énergétiques nationales montrent l’incapacité de l’État à répondre de façon satisfaisante à la situation. Ainsi, la politique de transition énergétique de l’Allemagne ne peut s’effectuer qu’au niveau européen. De récents travaux ont démontré que ses émissions de CO2 augmentent, du fait de la chute de la production industrielle survenue après 2009, et que les coûts de l’électricité demeurent particulièrement élevés. Une politique énergétique commune, misant sur la complémentarité énergétique de ses différents États-membres, semble de fait la seule façon pour faire face à l’impératif climatique aujourd’hui.
L’UE mal armée face à la question environnementale
Pourtant, alors que les négociations sur le changement climatique débutent en 1992, l’Union Européenne semble avoir mis la question en jachère. En effet, peu de moyens ont été mis en place en termes de gouvernance énergétique et environnementale, si bien que l’UE a acquis énormément de retard en la matière.
Des débuts mal assurés
Les débuts de politique européenne en matière environnementale ont en effet été pour le moins vacillants. Si la voie à un projet de politique commune en terme de protection de l’environnement est ébauchée en 1972 lors de la conférence des chefs d’État et de gouvernement, réunis à Paris, il faudra attendre 1986 et l’Acte Unique Européen pour que l’UE soit explicitement dotée d’une compétence en la matière.
Il faudra surtout attendre 2005 et le Système d’échange de quotas d’émission (SEQE) pour distinguer le premiers pas européen en matière de lutte contre le changement climatique. Mis au point afin de réduire les émissions de l’industrie de façon progressive et à moindre coût, le SEQE consiste en l’instauration d’un plafond imposé aux émissions des secteurs industriels à forte consommation énergétique. Au terme d’un processus de restitution des quotas pour chaque tonne de C02 émis, un mécanisme d’incitation positive à réduire les émissions s’ensuit.
Une législation jeune et vacillante, souvent mise à mal
C’est toutefois le récent scandale Volkswagen, qui, conjugué à la pression médiatique induite par la COP 21, a démontré les faiblesses de la législation européenne. La décision du Parlement Européen de ne pas ouvrir de Commission d’enquête Parlementaire, fin octobre 2015, a encore un peu érodé la crédibilité des instances européennes en matière de cohérence politique sur le plan environnemental. L’exigence environnementale et l’application des normes révèlent ainsi les faiblesses d’institutions prétendument indépendantes mais qui subissent, en réalité, les effets de l’industrie du lobbying.
Des projets aux contours flous : les jalons d’une Europe de l’énergie
La Commission européenne, présidée par Jean-Claude Juncker, a ainsi annoncé en 2015 que la mise en place d’une Union Européenne de l’Energie serait l’une de ses priorités. Miguel Arias Cañete (Espagne, PPE), commissaire en charge du Climat et de l’énergie, propose ainsi une série de mesures allant dans le sens d’une Union Européenne de l’Énergie, avec pour ambition de « disposer d’une énergie sûre, abordable et respectueuse du climat ». Son projet tourne autour de cinq grands volets, parmi lesquels la réorganisation du marché de l’énergie, qui doit aller vers plus d’intégration. Un exemple édifiant : le marché européen de l’électricité. La Commission poursuit ainsi le noble objectif d’atteindre 10% d’interconnexion en matière d’infrastructure de production et d’échange d’électricité d’ici à 2020. Dans le même temps, la Commission évoque un financement plus conséquent de la recherche et des avancés dans le domaine des énergies renouvelables qui permettrait de financer des projets innovants avec des perspectives d’emploi.
De même, l’Union Européenne entend s’imposer comme l’un des acteurs essentiels de la lutte contre le réchauffement climatique. Officiellement représentée à la COP 21, qui se tiendra à Paris du 30 Novembre au 11 décembre 2015, l’Union a été l’une des plus ambitieuse en annonçant, le 6 mars dernier, son objectif de réduire d’au moins 40% les émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici 2030.
Vers une Union de l’énergie
Toutefois, la réalité du terrain ne doit pas être négligée.
Un exemple a ainsi été vu le 12 novembre 2015, où la commission ITRE (industrie, recherche et énergie) du Parlement européen refuse une proposition rendant contraignante les objectifs climats de l’Union pour 2030, parmi lesquels une réduction de gaz à effet de serre de 40%. De nombreuses limites sont ainsi présentes, et la Commission le reconnaît elle-même : « le système énergétique européen n‘est pas encore suffisamment performant ». Raisons ? La conjoncture économique particulièrement défavorable aux investissements verts, ou encore le fait que d’autres priorités sociales remplissent l’agenda institutionnel sont régulièrement avancées. Certes. Mais c’est surtout l’absence de réel « fédéralisme vert » et d’envie politique qui fait défaut.
Il est donc clair que plus que jamais, la contrainte écologique doit jouer comme facteur d’évolution politique. L’environnement doit être replacé au cœur des rêves fédéralistes. Si l’environnement révèle les failles actuelles du projet européen, il pourrait bien également en être la solution.
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