La Sarre de 1945 à 1957 : un laboratoire européen. Héritages et enseignements Conférence de Cyril Robelin. Samedi 13 juin 2015 à Lyon.
Au sortir de la Deuxième Guerre mondiale, la Sarre, terre de frontière par excellence devient le laboratoire pour une Europe nouvelle. Le territoire acquiert son autonomie politique et demeure rattaché économiquement à la France dès 1947. En 1950, on souhaite en faire un pilier des institutions européennes. La Sarre devient un membre associé du Conseil de l’Europe malgré les réticences de la RFA. Avant de choisir Luxembourg pour le siège de la CECA, Sarrebruck est candidate. C’est finalement pour la Communauté européenne de Défense que la ville est retenue. Malheureusement, le projet fut abandonné après le rejet de l’Assemblée nationale française. Les accords de Paris du 10 avril 1952 propose de régler le cas de la Sarre. Elle deviendrait le « Washington DC » de l’Europe, après referendum, en européisant son territoire dans son ensemble selon le plan Van Naters de 1954 et en préparant une monnaie européenne.
La Sarre devient non plus un enjeu, mais un espoir pour les plus “européens”. En effet, ils voient alors l’occasion de donner une nouvelle impulsion à une Europe en construction. L’idée européenne s’ancre de plus en plus notamment par le vecteur de l’Université de la Sarre, véritable institution européenne qui accueille des étudiant du continent et dispense des cours en allemand, en français et en anglais. Johannes Hoffmann, chef du gouvernement autonome, déclame ses discours devant le drapeau sarrois mais aussi de l’UEF. On souhaite donc construire l’Europe politique mais aussi culturelle. Les Sarrois sont alors appelés aux urnes en octobre 1955.
La campagne est d’une violence rare. Les hommes politiques anciennement favorables à la solution européenne retournent très vite leur veste. Les partisans du non font tout pour détourner l’attention vers d’autres problématiques. Les utopistes des Nouvelles équipes internationales ou des fédéralistes européens font de nombreux efforts pour recadrer le débat, en vain. Le rejet du statut européen conduit alors au rejet du statut actuel de la Sarre. Par là même une certaine idée de l’Europe meurt en même temps que le plan d’européisation. Les pro-européens se réveillent avec un certain malaise puisque les résultats sont un désaveu. Le statut a été rejeté à plus de 63% des voix exprimées. Jamais l’Europe politique ne fut si proche. Mais les Sarrois n’ont pas vraiment voté pour ou contre l’Europe mais pour une question que l’on ne lui posait pas, c’est à dire l’union économique avec la France. L’Europe politique connut à ce moment un profond coup d’arrêt. Seule l’union économique a réussi ; non pas le rêve du gouvernement Hoffmann d’unir les Européens par le cœur.
L’orateur : Cyril Robelin
Né en Bourgogne en 1984 et ayant fait ses études à l’Université de Dijon et de Sarrebrück. Ses mémoires de master ont porté sur « La tutelle monétaire française sur la Sarre » et la « Question de la nationalité sarroise ». Actuellement enseignant d’histoire géographie au Lycée Verlaine de Rethel et doctorant à l’Université de Liège sur le territoire neutre de Moresnet, ses travaux portent sur le concept d’État-Nation et des Utopies aux XIXe et XXe siècles.
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