Gestion européenne des frontières extérieures : la fédéralisation en marche
Avertissement : les tribunes sont des contributions individuelles de sympathisants du mouvement au débat et ne reflètent pas nécessairement les positions de celui-ci.
Mardi, dans l’hémicycle Strasbourgeois, nos eurodéputés ont vivement salué l’initiative présentée par la Commission européenne de créer un corps européen de gardes-frontières. On peut effectivement féliciter ce projet, à condition qu’il s’accompagne de l’établissement d’une véritable politique européenne d’immigration et d’asile et qu’il n’altère pas davantage le projet politique européen.
Une réponse européenne nécessaire face aux non-réponses nationales
Alors que les États se montrent incapables de faire face à l’afflux massif des migrants, le projet de règlement européen propose d’octroyer bien plus de moyens opérationnels à l’agence Frontex, dont un corps européen de 1500 gardes-frontières et garde-côtes pour intervenir aux frontières européennes en cas de défaillance des autorités nationales. Non seulement ce corps pourrait être déployé en trois jours, mais surtout il pourrait être mobilisé malgré l’opposition de l’État concerné. Si, aujourd’hui, la politique d’immigration et le contrôle des frontières extérieures demeurent guidés par la « bonne » volonté de chaque État, ce mécanisme permettrait de dépasser leurs difficultés et leur inertie en substituant aux desseins nationaux le seul intérêt européen. Ce nouveau mécanisme permettrait ainsi d’apporter l’assistance nécessaire aux États pour la gestion des reconduites à la frontière des étrangers qui n’auraient pas acquis de droit de séjour, de mieux gérer les demandes d’asile et surtout, d’éviter les naufrages mortels en Méditerranée que les seuls dispositifs nationaux ne parviennent pas à endiguer.
Une réponse fédérale à encourager face à une crise européenne
Dans une Europe où tout circule librement dans un espace sans frontières nationales – les capitaux, les services, les travailleurs et les marchandises – il est devenu paradoxal de laisser le contrôle des frontières extérieures entre les mains des seuls États membres. « L’Europe ne se fera pas d’un coup, ni dans une construction d’ensemble : elle se fera par des réalisations concrètes créant d’abord une solidarité de fait », lançait Schuman en 1950, à l’heure où l’Europe se mettait à peine en marche. La solidarité est et restera la seule arme efficace et admissible face aux crises qui menacent et secouent le territoire européen. Alors que le Conseil européen s’est réuni hier sur ce sujet et qu’aucun accord n’a pu être trouvé entre les défenseurs infaillibles de la souveraineté nationale et ceux inquiets de l’absence de prise en charge européenne des migrants, il convient d’inviter nos chefs d’États à s’orienter définitivement vers la voie de l’intégration de la politique d’immigration et d’asile. Seule la responsabilité collective pourra sauver le projet européen tant critiqué par les nationalistes eurosceptiques toujours plus nombreux et les pro européens déçus par un manque d’Europe tangible et sclérosant.
Une responsabilité européenne accrue pour l’établissement d’une seule frontière extérieure
Des États incapables de gérer et de contrôler efficacement leurs frontières extérieures, une Europe transformée depuis quelques mois en un territoire semé de murs, des contrôles rétablis aux frontières intérieures… Notre liberté de circulation, l’un des plus grands acquis de la construction européenne, est aujourd’hui menacée, et avec elle, les craintes pour la sécurité des citoyens européens ont émergé. Les États doivent être placés face à leurs responsabilités : s’ils sont incapables, malgré les engagements formalisés dans les traités, de remplir leurs obligations, de fournir aux citoyens européens sécurité et protection des droits les plus fondamentaux, ils doivent en déléguer entièrement la responsabilité à l’échelle européenne. Or si la Commission parvient à surmonter l’opposition de certains États sur ce sujet, la responsabilité de l’Union sera, quant à elle, considérable et les attentes des citoyens accrues. En assumant la supranationalité des frontières extérieures – qu’elle aura la charge de définir et dé protéger –, l’Europe devra veiller à ne pas se transformer en une Europe forteresse mais à gérer efficacement, par la mise en place d’une véritable politique d’asile, la crise des réfugiés. Elle devra se montrer capable d’assurer, par une communautarisation progressive et renforcée de la lutte contre le terrorisme et des questions de défense, la sécurité des citoyens sur le sol européen.
Les murs nationaux de la honte doivent s’écrouler et les vents de l’Europe forte et unifiée doivent à nouveau souffler les exigences de liberté.
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