Guerre ou paix, règles de droit ?
Avertissement : les tribunes sont des contributions individuelles de sympathisants du mouvement au débat et ne reflètent pas nécessairement les positions de celui-ci.
J’écris ce petit pamphlet un 2 octobre, le jour de la « journée internationale de la non-violence », jour anniversaire de la naissance de Mahatma Gandhi, chef du mouvement pour l’indépendance de l’Inde et pionnier de la philosophie et de la stratégie de la non-violence (et assassiné en 1947 par un fanatique hindou).
Je l’écris aussi le 2 octobre 2024, alors que les citoyens du Monde attendent, souvent atterrés, un embrasement possible au Moyen-Orient, où la violence croit à un vitesse accélérée, une résurgence de la guerre moderne, à haute valeur ajoutée technologique, mais qui épargne de moins en moins les populations civiles.
Ils/elles sont nombreux les penseurs qui ont mis la recherche de la paix au centre de leurs préoccupations : Aristote, Emmanuel Kant, Mandela, Gandhi, Martin Luther King, Albert Camus, Bertha von Suttner ( 1843-1914 ), pionnière du pacifisme et première femme prix Nobel de la paix. Et aussi Gaston Bouthoul (1896-1980), fondateur et promoteur d’une nouvelle discipline qu’il appela polémologie, fixant pour objectif d’entreprendre l’étude scientifique de la guerre et des formes d’agressivité organisées dans les sociétés, afin de comprendre la place dans l’histoire humaine de ces phénomènes et d’en proposer des substituts. C’est ainsi qu’après la seconde guerre mondiale, il initie ce projet en fondant, avec Louise Weiss, l’institut français de polémologie.
Mais, réaliste, Gaston Bouthoul avait raison, et on doit retenir le fondamental de ses travaux « la guerre est l’état normal de l’humanité » (Traité de polémologie. Sociologie des guerres, Paris, Payot, 1970)
En effet, dans l’histoire, les périodes de paix n’ont été que des phases de transition entre deux guerres, la paix [1] était l’état de non-guerre, associée à des périodes de trêve obtenues par négociations entre les puissants, s’appuyant sur des nationalismes souvent obscurs.
De ce point de vue, pour la consolidation de la paix, la pax romana, la pax americana, la pax britannica... n’ont été que des leurres. Elles traduisaient la domination d’une puissance, le plus souvent sans scrupule, et sûre de son droit d’utilisation de la violence.
Mais il apparaît que, dans notre monde du XXIème, devenu multipolaire, la « puissance devient impuissante » (cf les réflexions de Bernard Badie, dans son livre à paraître, L’art de la paix).
Pax romana, pax americana, pax britannica... des leurres pour l’appétit de paix, mais qu’en est-il de la pax europea ?
Oui, après les errements terribles des conflits mondiaux de la première moitié du XXème siècle, les Européens ont pris conscience du besoin pressant de changement de paradigme. D’où la création et mise en œuvre, depuis 1950, d’un nouvel ordre européen, plus pacifique, s’appuyant sur les solidarités de fait entre Européens, et surtout sur la mise en place de règles de droit.
La guerre entre partenaires européens de l’Union est maintenant improbable, beau message, mais loin d’être repris de niveau de la planète puisque les conflits mondiaux, après une accalmie relative de plusieurs décennies, reprennent de plus belle (guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine, Proche et Moyen-Orient, sans oublier les conflits plus locaux et parfois oubliés).
Mais l’Union Européenne, qui n’a pas été à même de prolonger et affiner son message (la Fédération reste un idéal non transformé en réalité tangible), n’a pas la puissance pacifique de s’affirmer et agir sur les conflits du moment (encore hier, elle a été incapable, du fait de la règle de l’unanimité, de proposer une solution équilibrée pour le conflit du Moyen-Orient, un véto de la Tchéquie…)
Force est de constater que les anciennes pratiques guerrières, guidées par les appétits de puissance, mènent à l’impasse, à l’accélération des drames humains et aux possibilités de conflits généralisés. La puissance, en effet, et on le voit pour les deux conflits majeurs de 2024, le Moyen-Orient et Ukraine-Russie, ne peut permettre de gagner une guerre !
Il y a dès lors deux impératifs, agir au niveau du droit international, ou (et en parallèle) espérer un sursaut de citoyens du monde.
Nous vivons en effet un monde paradoxal : Amin Maalouf, l’humaniste et écrivain franco-libanais, de l’Académie française, qui était le week-end dernier à Lourmarin, pour le festival annuel Albert Camus, dont le thème cette année était la « fraternité », nous le rappelait : comme nous tous, il aurait beaucoup de mal à dialoguer avec son grand-père ou ancêtres, tant les référents étaient différents (la guerre systématique, l’isolement, la situation d’alors), alors qu’il s’avère de plus en plus facile, avec les moyens d’échanges d’informations, d’expériences, de valeurs, de dialoguer avec un nombre immense de nos contemporains sur l’ensemble de la planète, et mieux se comprendre, dans le respect de nos différences. C’est un avantage du monde du XXIème qu’il faut prendre en compte et utiliser !
Oui, et c’est très dur de l’assumer, la situation nous semble ingérable.
Nos messages européens de renforcement du droit international, consenti par tous, sont inaudibles par les puissants. Or, et on le voit, la puissance mène à l’impuissance, au désordre généralisé, la violence reste vaine, sauf à flatter les égos et intérêts de ceux qui se croient puissants….
Continuons à croire à l’idéal de fédération, celle qui réunit les différences. Le terreau est fertile, puisque la communication entre citoyens du monde n’a jamais été aussi fluide et intense. Nous, militants, continuons à travailler à l’émergence de fédérations, idéaux de construction humaine, sociale et de solidarité robustes.
C’est sur ces bases que le droit international s’affirmera, le plus tôt sera le mieux…
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